Que ce soit à la fin des études supérieures ou encore dans le cadre d’une reconversion professionnelle, la question du métier à choisir peut être une importante source d’angoisses. Peur de se tromper, pression de l’entourage ou difficulté à trouver l’emploi sa voie, se poser certaines questions permet souvent d’y voir plus clair.
Vivre de sa passion
Aussi étonnant que cela puisse paraître, je ne recommande pas forcément de choisir son métier en fonction de ses passions. Pourquoi ? Parce qu’être passionné par une chose ne signifie pas souhaiter faire cette chose au quotidien.
Par ailleurs, la passion peut être très éphémère et ce qui vous semblait si prenant à un moment de votre vie peut quelques temps plus tard vous désintéresser totalement, non pas parce que vous avez cédé à un caprice mais parce que vous évoluez et que surtout, la passion étant liée à l’émotion, lorsque l’intensité de cette dernière baisse vous pouvez avoir le sentiment de ne pas avoir pris la bonne voie.
De plus, le problème de la passion est que parfois nous en avons tellement qu’il peut être très compliqué de faire un choix car encore une fois, l’émotion ressentie peut nous donner le sentiment de renier une chose importante pour nous au profit d’une autre. Dans ce cas il devient compliqué de se fixer car on a l’impression de tout aimer, sans être capable de faire la distinction entre aimer faire et l’envie de faire au quotidien.
Ce n’est pas parce qu’on est passionné par une chose que l’on aura l’envie de vivre de cette chose, d’y dédier une grande partie de notre temps.
L’envie est à mon sens la question première à se poser lorsque l’on envisage un métier : prendre tous les paramètres (avantages et inconvénients, car il y en a toujours), et se demander objectivement : est-ce que j’ai envie de faire ça sur du long terme ? Est-ce que j’ai envie de me lever le matin en sachant que j’aurai telle ou telle tâche à réaliser, et ce pour un certain nombre d’années ?
Pour vous donner un exemple facilitant la dissociation entre la passion et l’envie, je peux vous parler de ma passion pour la peinture. Prendre une toile blanche, y exprimer mes émotions du moment, me vider la tête en laissant libre cours à ma créativité, j’adore ça, j’y pense souvent, et dès que je peux prendre le temps de m’y adonner je ressens beaucoup de joie. Pour autant, je ne me verrais pas vivre de cette passion, tout simplement parce que si je devais peindre pour gagner ma vie je pense que je perdrais une grande part du plaisir que cela me procure.
Il en est de même pour la lecture. Depuis très jeune j’enchaîne les livres, je voue un culte à la FNAC et je suis capable d’y passer des journées entières à chaque fois que je rentre un peu en France. Mais si on me proposait d’en faire mon métier je sais qu’à la longue cela deviendrait une contrainte.
La passion, c’est avant tout un plaisir. Et comme beaucoup de plaisirs on l’apprécie parce qu’aucune contrainte n’y est attachée. On est parfaitement libre de laisser nos passions de côté un long moment, parfois même quelques années, et d’y revenir avec à chaque fois cette joie de pouvoir s’évader un peu sans attente à satisfaire, sans pression.
C’est en cela qu’il peut être dangereux de choisir son métier uniquement autour du critère de la passion car le risque de déception est élevé.
Il faut aussi préciser que certaines personnes n’ont pas de passion, et que cela est parfaitement sain ! Nous n’avons pas besoin d’être passionné par une chose pour l’aimer, et j’ai déjà accompagné des personnes qui lors de leur première consultation se sentaient totalement déstabilisées parce qu’elles pensaient que ne pas avoir de passion signifie être aigri ou ne pas savoir prendre de plaisir. Si c’est votre cas, déculpabilisez-vous car vous êtes tout-à-fait normal !
Donc dans le cadre de la recherche d’un métier, la question serait plutôt « qu’est-ce que je prends plaisir à faire, et que j’aurais envie de faire au quotidien malgré les contraintes possibles ? » plutôt que « quelle est ma passion ? ».
Vie privée et vie professionnelle
L’une des raisons pour lesquelles beaucoup de personnes finissent par ne plus se retrouver dans leur métier est qu’elles adaptent leur vie privée à leur vie professionnelle, au lieu de trouver l’occupation qui s’adaptera à leur vie et ce qu’elles souhaitent en faire.
Par vie privée je ne parle pas que du couple car le centre de la vie n’est pas là, je parle aussi des loisirs, de la quantité de temps disponible que nous souhaitons nous consacrer, du rythme de vie dont nous avons besoin pour être épanoui et aussi du degré de sécurité qui nous est nécessaire pour nous sentir bien.
Si votre métier est en contradiction avec vos besoins profonds, vous risquez de perdre le sens de votre vie car il y aura une incompatibilité entre votre équilibre et vos obligations quotidiennes.
Il est donc fondamental que vous vous interrogiez de manière honnête sur :
- votre besoin de stabilité (si cette valeur est fondamentale pour vous, inutile de vous diriger vers une profession dont la rémunération serait soumise à des aléas ou dont les horaires seraient amenés à changer en permanence par exemple) ;
- votre résistance au stress (certains métiers induisent un stress important, soit à cause des responsabilités qui y sont attachées, soit par certains risques qui y sont inhérents, donc il est bon de savoir en amont si vous pouvez y faire face sereinement, et non aller travailler la boule au ventre) ;
- votre capacité à travailler en groupe (il y a des personnes qui aiment travailler seules, d’autres qui ne se sentiraient pas motivées sans une équipe autour d’elles. Dans les deux cas il faut savoir où vous vous situez) ;
- le niveau de responsabilité que vous êtes prêt à endosser (l’important n’est pas ce que les autres pensent ou le supposé prestige attaché à votre titre, mais le confort que vous ressentirez au quotidien dans l’exercice de vos fonctions. Donc même si chaque employé est important, si vous vous sentez plus à l’aise à un poste d’assistanat qu’à une fonction qui fait dépendre de vous des éléments particulièrement sensibles de la gestion de l’entreprise, il faut aussi être clair avec vous-même) ;
- l’importance de votre réalisation professionnelle (être carriériste n’est en rien une référence ni une obligation. Certaines personnes n’attachent que peu d’importance à l’évolution de leur carrière et trouvent leur équilibre dans le simple fait d’avoir un poste qu’elles maîtrisent et des rentrées d’argent stables, ce qui est parfait si cela vous rend heureux).
Ces quelques axes vous permettront de dessiner de manière plus précise l’environnement de travail qui vous conviendrait. Il ne s’agit pas de caprice mais de compatibilité entre ce que nous sommes et ce que nous faisons au quotidien.
Je précise également qu’il peut y avoir des moments dans une vie pendant lesquels nous devons être plus flexibles sur certains de nos critères. Savoir s’astreindre est également important, on n’obtient pas forcément du premier coup le métier de nos rêves et toute évolution se fait par palier, mais ce qui est fondamental est de ne pas perdre de vue les valeurs profondes qui sont les vôtres pour pouvoir, à court ou moyen terme, les retrouver dans votre activité professionnelle.
S’investir dans son travail
Une dernière donnée importante à prendre en compte est l’investissement que vous êtes prêt à accorder à votre travail, qu’il se compte en temps, en nécessité d’apprentissage ou même en intitiatives.
Il est important de savoir si vous êtes prêt à travailler beaucoup, à vous former tout au long de votre parcours et à être force de proposition dans l’exercice de vos fonctions, ou si au contraire le travail ne représente pour vous qu’un moyen de gagner de l’argent et que cela vous convient très bien parce que vos intérêts se situent ailleurs.
Même si certaines personnes sont réellement fainéantes et espèrent gagner le plus possible sans devoir s’investir à la hauteur de leurs attentes, d’autres considèrent simplement que leur fonction doit s’arrêter à l’horaire précisé au sein de leur contrat de travail et n’auront pas envie d’en faire plus car elles scindent de manière drastique les différents domaines de leur vie. Là encore, il faut le savoir.
La question de l’investissement se pose aussi au niveau de l’accès à la profession à laquelle vous pensez : si vous ne voulez pas vous astreindre à un certain nombre de mois ou d’années d’études pour obtenir votre qualification, et à moins qu’il ne s’agisse d’une habitude que vous avez de rechercher sans cesse la facilité, c’est que le métier envisagé ne vous donne pas réellement envie de vous donner les moyens d’y parvenir. Dans ce cas il serait préférable de vous orienter vers autre chose qui aura davantage de valeur à vos yeux.
Travail et argent
La question du salaire est propre à chacun de nous : certaines personnes n’envisagent pas de travailler au-dessous d’un certain salaire, d’autres sont davantage intéressées par la gratification que leur apportera leur activité que par l’argent qui en découlera.
Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise vision des choses, mon avis est que nous avons tous droit à une abondance illimitée, qu’elle s’exprime par l’argent ou d’autres choses.
Soyez néanmoins réaliste : si vous savez que le métier qui vous plaît vous rapportera seulement de quoi joindre péniblement les deux bouts, peut-être serait-il préférable de trouver un autre moyen de faire ce que vous aimez tout en bénéficiant d’une assise financière plus confortable. Je pense à l’une de mes consultantes qui est comédienne et qui, bien qu’elle adore son métier et n’en changerait pour rien au monde, vivait dans l’angoisse permanente car ses contrats ne lui rapportaient pas de quoi vivre sereinement. Après notre travail ensemble elle a trouvé un poste au sein d’une école de théâtre, ce qui lui a permis de sécuriser ses finances tout en continuant de vivre de ce qu’elle aime.
Dans tous les cas, il est primordial de ne pas prendre l’argent comme critère premier dans le choix de votre profession. Il est sain de vouloir bien gagner sa vie, mais si la seule chose qui vous motive est cette question pécuniaire, il arrivera un moment où vous vous sentirez mal car ni l’envie ni la motivation ne seront présentes. Aucune somme d’argent n’a la capacité de vous rendre heureux.