Arrêter d’avoir peur

Arrêter d’avoir peur

La peur, ennemie de beaucoup d’entre nous, cache davantage une angoisse d’être rejeté qu’une émotion rationnelle. Revenir à soi, en se dégageant du poids des attentes des autres, permet bien souvent de la surmonter.


Au-delà de toute peur fondée et saine qui nous permet de prendre du recul, de faire preuve de prudence et de mesurer le poids de nos actes, beaucoup de personnes ont ce sentiment d’être bloquées, plaquées au sol par un sentiment d’incapacité à avancer et à prendre les décisions nécessaires pour se construire une vie à leur image et aller au bout de leurs désirs.

J’ai cette profonde conviction que nous avons tous les mêmes capacités intérieures et que seule diffère notre croyance en notre possibilité de mobiliser des forces qui pourtant sommeillent en chacun de nous. Si j’estime ne pas être assez bien pour telle chose, ou ne pas être capable de faire telle autre chose, alors je reste dans l’inaction.

Mais à mon sens, la stagnation provient surtout du regard de l’autre : si je décide de vivre comme j’en ai envie et de penser à moi d’abord, que vont penser les autres de moi ?

La peur de perdre l’amour de l’autre

Suivre son propre chemin, c’est accepter d’aller à contre-courant, que ce soit par rapport aux attentes de nos proches ou de ce qui est communément admis dans la société dans laquelle nous vivons.

C’est assumer les regards de désapprobation, les critiques et les jugements, et devoir malgré tout garder la tête haute et continuer à avancer.

L’être humain est un individu de lien. C’est le lien, l’amour et la reconnaissance de ses parents qui permettent au petit d’Homme de se construire et de continuer à évoluer. Sauf qu’à l’âge adulte, cette quête de l’approbation et de l’amour des autres peut être la cause d’une incapacité à avancer.

Beaucoup d’êtres ne se définissent qu’au travers du regard de l’autre. Ils étalent leur réussite financière au travers de grosses voitures ou de vêtements de luxe pour avoir le sentiment d’avoir réussi leur vie. Ils restent emprisonnés dans des unions douteuses ou sans amour par peur de ce que les autres pourraient penser en cas de rupture ou pour éviter les jugements. Ils s’engagent dans des voies professionnelles qui ne reflètent pas leurs réelles envies parce qu’il faut bien faire quelque chose et que, dans notre société actuelle, prendre le temps de trouver sa voie s’apparente à une instabilité.

En fait, en cherchant à tout prix à se sentir dans les rails, à l’intérieur d’un groupe dont il respecte les règles, l’Homme en vient à nier qui il est profondément.

Une vidéo révélatrice de ce besoin de l’Homme de se plier aux règles d’un groupe a été diffusée sur internet. On y voit une salle d’attente remplie de personnes, certaines sont des comédiennes et d’autres des patients lambda. A intervalle régulier, une sonnerie retentit et les comédiens se lèvent, puis se rasseoient. Au bout d’un laps de temps assez court, on observe que les non comédiens finissent par adopter la même attitude que les comédiens et se lèvent et se rasseoient à chaque sonnerie. Ils ne savent pas pourquoi, ni à quoi cette sonnerie correspond, mais ils finissent par adopter le même comportement que les autres personnes présentes dans la salle d’attente, pour ne pas sembler différents et peut-être, être rejetés.

J’ai trouvé cette expérience passionnante car elle n’est que le reflet de ce à quoi nous assistons dans la vie de tous les jours : des êtres qui agissent comme d’autres, sans trop savoir pourquoi mais simplement pour éviter d’être mis de côté. Cela n’empêche pourtant pas la plupart d’entre eux de ressentir un profond sentiment de solitude…

L’individualisme comme nouvel altruisme ?

Au risque de choquer, je crois profondément dans le fait qu’avant d’être tournés vers les autres, nous devrions revenir à nous.

Trop longtemps, nous nous sommes construits en conformité avec l’idée selon laquelle nous devions donner, penser aux autres, se sacrifier, s’oublier pour prouver à quel point nous sommes des êtres bons, généreux. L’oubli de soi s’est presque imposé comme une norme sociétale.

Pourtant, si l’on revient au point de vue de l’âme, chacun d’entre nous doit être capable de se connaître, de se reconnaître. Cela n’a rien à voir avec les autres, qui sont des partenaires d’apprentissage, mais avec la capacité à nous définir en tant qu’être complet, unique et qui, se reconnaissant dans cette individualité, deviendra aussi capable d’intéragir de manière saine avec l’autre et de comprendre le lien qui l’unit à tout ce qui l’entoure.

D’un point de vue plus général, ce besoin de se fondre la masse a engendré des êtres qui ont perdu en chemin leur identité propre et qui ne savent plus qui ils sont, ce pour quoi ils sont faits ou comment agir au quotidien pour s’épanouir. Une réelle perte de reconnaissance de soi.

Je distingue l’individualisme de l’égoïsme. Dans le premier cas, je prends conscience de qui je suis d’abord, de mes propres besoins et je recherche un équilibre car j’ai compris que c’est ce dernier qui me permettra d’apporter au monde le meilleur de moi.

Je ne recherche pas à piétiner les autres mais j’ai compris que si je ne me réalise pas, je ne trouverai jamais ma place dans ce monde. J’accepte de décevoir parfois mais quand je le fais ce n’est jamais de manière malsaine : c’est parce que je comprends que je ne peux pas nier qui je suis ni me conformer aux désirs des autres. Cela ne m’empêche pas de les traiter avec respect et considération.

Dans le second cas, je ne cherche qu’à servir mes intérêts propres en me moquant pertinemment de la conséquence de mes actes sur les personnes qui m’entourent puisque seule ma satisfaction compte. Je ne cherche pas à m’améliorer ni à me réaliser, je me contente de prendre tout ce que les autres ont à me donner et j’attends d’eux qu’ils me mettent au centre de leurs préoccupations.

Nous en revenons donc à un sujet que j’ai déjà traité : accepter de décevoir.

Parce que si j’accepte de ne pas agir conformément à ce que l’on attend de moi, mais en fonction des besoins qui sont attachés à ma personnalité, j’accepte d’être vraiment.

Décevoir ne signifie pas faire du mal volontairement.

On peut décevoir une personne en la quittant parce qu’on réalise que la relation ne nous permet plus d’évoluer, mais le faire de manière respectueuse en expliquant le cheminement intérieur qui nous a poussé à prendre cette décision.

On peut décevoir nos parents ou nos enfants en empruntant des chemins qui ne vont pas dans leur sens, mais là encore en leur expliquant ce qui motive nos choix, et qu’aimer véritablement une personne c’est aussi lui permettre de faire ses expériences, que celles-ci soient conformes à ce que nous considérons être le « bien », ou pas.

Alors la prochaine fois que vous aurez peur, demandez-vous si ce sentiment vous appartient vraiment ou s’il n’est que le reflet de votre angoisse d’être jugé, mal aimé ou rejeté.